Sur les cartes et dépliants touristiques, ces îles figurent juste à la sortie des ports de Cannes, on pourrait y aller à la nage, semble-t-il, peut-être pour ne pas dissuader les touristes de faire le trajet en navette ?

En fait, la plus proche et aussi la plus grande est à... un mille et demi : Ste Marguerite ; elle s'étire d'Est en Ouest sur 3 kms. Nous ne la connaissons pas.

Grand beau temps ce vendredi enfin, encore du vent d'Ouest, d'une force moindre qu'hier. Dès la sortie du vieux port, on hisse les voiles, le soleil bas en hiver est pile dans le cap à cette heure de la matinée, on n'y voit pas avec précision. En s'approchant, on repère les deux balises et la tourelle blanche ruinée de la pointe Batéguier ainsi que le chantier naval au pied du Fort, dont parle le guide. La houle se fait encore bien sentir et le vent semble forcir du NW, on abat pour longer le Nord de l'île : il y a quelques bateaux au mouillage, qui semble bien mal abrité de ce vent.

On continue vers une petite pointe après le Fort imposant, pensant pouvoir mouiller en eau plus calme, juste avant une autre balise Nord à côté de laquelle on devine une ferme marine. Mais c'est encore plus agité, il y a une houle d'Est aussi ! En fait ce doit être la houle de Sud qui contourne ces petites îles de chaque côté ? Demi-tour, on n'a pas vraiment envie de se faire brasser au mouillage alors qu'on a une place douillette au port à une demi-heure de là...

On tire un bord vers la pointe de la Croisette, un coup de gite et vlan, la porte d'un équipet de la cuisine s'ouvre en grand : toute l'épicerie entamée par terre ! Seule la boîte à sel était mal fermée heureusement ! On vire, c'est plus cool sur l'autre bord, on arrive au milieu des bateaux mouillés dans 2,50 m d'eau. Un autre bord et on atteint rapidement l'entrée du vieux-port.

C'est ce qu'on appelle une petite sortie, mais quand même, 5 milles de plus au compteur ! On se met cul à quai, toujours aussi laborieusement, l'hélice tripale n'améliore pas les choses autant que le cap'tain ne l'espérait. Pique-nique dans le cockpit : 20° en plein soleil, à l'abri du vent derrière la capote.

L'annexe est de sortie

Préparatifs

Le lendemain, après une nuit très calme, le temps est toujours aussi idéal pour aller aux îles, on démarre plus tôt. Le vent est quasi nul ; devant Port-Canto, deux petits pêcheurs remontent leur filet, entourés d'oiseaux posés sur l'eau. Après l'avoir coupé, pleins d'espoir, on remet le moteur, cap direct vers le mouillage repéré hier : on laisse tomber la pioche dans 2,20 m au sondeur, l'eau est limpide à souhait, fond de posidonies avec des trouées de sable, disparue la houle désordonnée d'hier.

Le temps de gonfler l'annexe, sortir le moteur et se préparer pour une balade à terre, plusieurs bateaux arrivent, c'est samedi. Petit tour dans le village, maisons fermées, seul le restaurant « L'escale » est ouvert. Un coup d'oeil au ponton pour savoir si on peut venir à quai : pas de problème, il y a de l'eau, environ 2 m mais on ne peut y rester que 6 h maxi, dit la pancarte. Pas de pendille, on mouille son ancre et on vient s'amarrer cul à quai. Pour y accéder, il faut suivre le chenal balisé pour les navettes.

Retour à bord pour déjeuner. Une jolie mouette vient se poser tout près. Après un moment d'attente à guetter chacun de nos mouvements, elle se met à crier en levant le bec, ma parole elle nous engueule ! C'est bien ça, elle réclame et comme rien ne vient, elle râle !

Une petite brise se lève de l'Ouest, pourtant les bateaux gardent l'étrave à l'Est, il doit y avoir un peu de courant. Le plan d'eau s'anime, y a de la régate en vue. Le cap'tain n'a plus envie d'aller faire le tour de l'île à pied, alors on va le faire à la voile...

Départ en laissant le foc à contre pour être sur le bon bord dès l'ancre levée. Cap à l'Est au portant, ça glisse à 4 nds sur une mer belle. Passée la ferme marine, il faut lofer pour contourner l'îlot plat de la Tradelière. Le vent monte un peu, la houle du large se fait sentir. Plein de voiliers maintenant autour de nous, ça fait plaisir, on se sentait un peu seuls jusque là.

On vire pour passer entre les deux îles : il y a maintenant un chenal rectiligne d'une dizaine de hautes balises rouges et vertes probablement permanentes, alors que le guide indique un balisage saisonnier, qui était absent lors de notre escale en février dernier... ? On tire une demi-douzaine de bords pour remonter le passage large d'un demi-mille, en eau plate maintenant, un vrai plaisir.

Le soleil ne va pas tarder à se coucher derrière l'Estérel, la lumière est dorée, les verts de la végétation touffue de la grande île se détachent sur le ciel violet, dans le lointain on devine même les sommets enneigés ! Magnifique ! Le vent faiblit, on se fait remonter par un bon vieux 470 ! On rase la pointe du Dragon et on peut lâcher les écoutes, cap sur la tourelle coiffée de rouge du vieux port. Le soleil disparu, on sort les bonnets et les gants... brouh, c'est vrai que l'hiver n'est plus très loin !

Belle manoeuvre pour culer à quai cette fois-ci, on avait un peu plus de place en l'absence du trimaran en vis-à-vis. L'annexe restée à la traîne passera la nuit amarrée sur le balcon avant. Il fait nuit noire quand on termine l'amarrage, 17h30 !

Fort de Sainte-Marguerite

Un dimanche au mouillage au pied du fort de Sainte-Marguerite

Une parenthèse enchantée, c'est l'expression qui me vient à l'esprit pour évoquer ce dimanche...

Quelques petits nuages au réveil, mais la prévision météo est bonne, alors on retourne une troisième fois à l'île Ste Marguerite ! Dès la sortie du port, on peut mettre à la voile avec un vent NE force 1 à 2, cap direct sur le mouillage. Le gros cata-navette « Caribe » y arrive en même temps que nous à grande vitesse : le cap'tain fait faire un 360° sur place au Moustic... pour lui laisser la priorité, ainsi qu'à un gros zodiac des pompiers, qui eux nous remercient d'un signe.

Mouillage à la voile, tranquillement, au même endroit qu'hier. L'annexe est déjà prête, on va débarquer au tout petit quai à gauche du restaurant « L'escale ».

Le guide côtier d'Alain Rondeau, finalement trouvé ici à Cannes, chez Roméo Marine, quai St Pierre, décrit le Fort comme étant une caserne sans intérêt. Nous l'avons trouvé très beau et fort intéressant à visiter et à photographier sous la douce lumière d'hiver ! C'est un vrai village fortifié, vide en cette saison, mais qui sert d'hébergement saisonnier pour les scolaires et associations qui en font la demande. Ce lieu est à la fois nature, sauvage et entretenu juste ce qu'il faut. On y trouve des grands cistes, de vieux figuiers, des pins maritimes, des tilleuls, des platanes et de vastes espaces colonisés par d'immenses acanthes d'un beau vert vernissé. Je me verrais bien gardienne du Fort-Royal de Ste Marguerite !

Mouillage au pied du fort de Ste Marguerite

Le mouillage vu du fort, à droite le chantier pour maxi-yachts

Golfe-Juan vu du fortA l'intérieur du fort

L'intérieur de l'île est quadrillé de grands chemins bordés d'arbres d'espèces variées : eucalyptus, grands pins, cèdres, chênes, entretenus par l'ONF. On croise quelques promeneurs en quête d'un endroit où pique-niquer au soleil. Il suffit de marcher un gros quart d'heure pour traverser l'île du Nord au Sud et on débouche sur une minuscule plage encadrée de rochers recouverts de posidonies sèches. A l'arrière-plan en contre-jour, on distingue le port des Moines de l'île St-Honorat surmonté au loin par le clocher du monastère. En février dernier, nous avions mouillé à l'extérieur : le vent d'Est s'était levé par surprise pendant la nuit et le Moustic avait marsouiné allègrement jusqu'à l'aube. Inconfortable ! Eucalyptusle puits du fort

On rentre à bord, les promeneurs du dimanche sont arrivés, qui en voilier, qui en bateau à moteur, qui avec la navette. On aperçoit aussi des spis vers La Napoule, de jeunes planchistes encadrés par des bateaux de sécurité et aussi des kayaks de mer. Mais heureusement, pas de scooters, ils sont interdits par ici ! On va pas se plaindre !

Le vent est toujours à l'Est, on gréée la table de cockpit en plein soleil, abrités du vent par la capote : situation idéale pour un déjeuner dehors en T-shirt, qui se prolonge jusqu'à l'heure du départ... Retour à la voile encore, au portant à 2nds... plusieurs voiliers sans voiles se pressent vers le port au moteur !

Je gage que cette journée, comme une petite poignée d'autres, restera dans un coin de ma mémoire pour surgir à nouveau le jour où je ne pourrai plus naviguer. Soleil couchant sur l'Estérel

Soleil couchant sur l'Estérel